Je tiens à démarrer mon discours avec cette citation ; argument suprême des docteurs médiévaux quand ils se référaient à Aristote, ce principe n’a cessé d’exister au fil des siècles. Selon eux il avait tout dit, sur à peu près tout, il ne pouvait qu’avoir le dernier mot. Au XXe siècle cependant, on condamna ce recours à l’argument d’autorité, définitivement, en se fondant sur Karl Marx (que Sartre déclara indépassable dans la Critique de la raison dialectique), Freud, Foucault et Lacan.

C’est sur la base de ce mot, le magister, que repose mon intégration au Cours du Pont de Pierre (CPP). Pourquoi ? Tout simplement parce que nous ne pouvons concevoir la notion d’une « école » ou d’une « éducation » qui renverrait à une essence éternelle, codifiée par des institutions supérieures ; la suprématie hiérarchique du maitre sur l’élève. C’est tout l’engagement de Grégoire Van Steenbrugghe, qui à la manière de l’école épicurienne, fonda cette école, peut-être faudrait-il se résoudre à employer plutôt le terme de « communauté », dans un but précis : proposer une alternative à l’éducation « traditionnelle ».  

Le Cours du Pont de Pierre est une communauté

En effet, mon adhésion fut totale au modèle proposé par Grégoire, car il repose sur un concept fondamental à mes yeux (toujours un héritage de la pédagogie épicurienne et j’y tiens…), celui de parrhèsia, que l’on peut traduire par « franchise », « liberté de parole ». Qu’est-ce donc encore que ce professeur d’histoire, qui cherche à obscurcir les foules avec des propos alambiqués, me direz-vous ? Tout simplement un moyen privilégié pour accéder à la sagesse et au bonheur. Voilà une conception qui peut paraître hérétique dans d’autres établissements…

L’établissement du Cours du Pont du Pierre est donc une « communauté » où le rapport entre l’élève et le précepteur recouvre des valeurs antiques. Voilà donc une « renaissance » de l’éducation. L’élève est mis au centre du discours, où l’objectif est double ; lui permettre de développer une appétence pour la culture, le savoir, l’apprentissage de toutes choses, mais également de se développer en tant qu’individu que l’on reconnaît. A l’image de cette école grecque, le précepteur (scholarque), est entouré de quelques élèves dans une salle de classe (et non, pas en extérieur vous me direz…) qui sont tous privilégiés ! Pourquoi j’ose utiliser ce terme ? Car nous ne sommes plus dans des classes au sens classique du terme, constituées au minimum de trente voire quarante élèves. Toute l’équipe pédagogique a la chance formidable de pouvoir aider chacun des élèves avec la même intensité, le même combat. Voici le privilège dont nous honorent les élèves : le combat que nous devons mener chaque semaine pour permettre à chaque élève, individuellement, de se reconnaître comme une personne, importante, écoutée, et heureuse.

Une école qui prend en considération chaque élève

Afin de mener à bien ce projet, nous pouvons déployer tout un panel d’outils les plus divers ; voici un autre aspect du Cours du Pont de Pierre qui me ravit chaque jour. Prendre en considération chaque élève, c’est savoir adapter son support d’enseignement en fonction des difficultés de chacun. Une richesse qui ne peut être aussi facilement mise en place dans des classes constituées d’un grand nombre d’élèves. Un aspect renforcé par la notion, évoquée plus haut, de « franchise » ou de « liberté de parole ».  Comment cela se traduit-il au quotidien ?

J’ai par exemple donné un cours commun sur le monde romain, une thématique au programme de 6e mais également revue et accentuée pour les élèves de Seconde. Comment créer l’appétence tout en développant le programme et permettre l’acquisition d’un savoir par les élèves ? Les supports utilisés furent multiples, allant d’une visite guidée de la ville de la Rome antique (l’université de Caen met à disposition une visite en 3D de la ville), aux textes des auteurs classiques, œuvres d’arts diverses et caetera… A chaque fois le réflexe fut le suivant : donner la parole aux élèves, à leurs ressentis, appeler à une réflexion et leur permettre de s’exprimer et d’avoir confiance en eux et en leurs potentiels personnels. C’est par cet échange oral privilégié, qu’une relation non pas hiérarchique se met en place, mais de confiance, permettant à l’élève de se sentir conscient de ses capacités, et reconnu. Une clef pour permettre à l’élève d’acquérir un intérêt, une méthodologie et l’acquisition des savoirs, des pratiques nécessaires pour son parcours futur. Comme toute relation, elle est à signaler dans les deux sens ; le précepteur que je suis fut également bousculé, positivement, par ce nouveau modèle d’enseignement. Nous sommes tous les jours dans un échange perpétuel avec nos élèves, à travers lequel nos méthodes d’enseignement doivent être constamment remises en cause pour le bien de tous les élèves. Merci encore au Cours du Pont de Pierre d’offrir ce cadeau aux enfants, mais aussi aux précepteurs.

Tristan Dieu

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