Phobie des maths : problèmes … et solutions !
La « phobie des maths » peut-elle expliquer, au moins en partie, les mauvais résultats des élèves français aux tests PISA ? Mal très répandu dans la société française parmi les jeunes (et les moins jeunes), la phobie des maths n’épargne pas les élèves qui nous rejoignent, bien au contraire. C’est un sujet auquel nous sommes souvent confrontés au Cours du Pont de Pierre : école, collège et lycée pour élèves qui ne se sentent pas bien dans le système scolaire. Nombreux sont en effet ceux qui nous rejoignent justement en raison d’une « phobie des maths ». Dans cet article nous vous proposons de découvrir comment nous identifions et appréhendons ce phénomène, et surtout comment nous accompagnons les élèves à surmonter, ou à dépasser leur peur.
La « phobie des maths » : de quoi parle-t-on ?
Comment la « phobie des maths » se manifeste-t-elle ?
Mains moites, palpitations, maux de ventre, troubles respiratoires, coloration de la peau … la phobie des maths peut se manifester de bien des façons, et le problème majeur que l’on rencontre à l’école c’est que, bien souvent, cette phobie empêche de réfléchir, de penser, de raisonner … Telle une panique généralisée qui envahit tous le corps, elle empêche le cerveau d’utiliser les fonctions cognitives nécessaires à la résolution de « problèmes ».
Demander à la personne ressentant cette panique de « se calmer », « se concentrer » ou de « moins s’écouter » n’est pas une solution efficace. Nier sa souffrance non plus.
La « phobie des maths » : une souffrance réelle …
De réelles douleurs peuvent être détectées dans certaines zones du cerveau chez les personnes souffrant de « phobie des maths ». Il n’est donc pas question de remettre en cause la réalité de cette souffrance.
Il nous est aussi arrivé au CPP d’accueillir des élèves qui avaient pris l’habitude, avant d’arriver parmi nous, de se tapoter (plus ou moins violemment) le visage quand ils ne trouvaient pas de solution à un « problème » mathématique, comme pour « déboguer » un cerveau qu’ils sentaient comme « engourdi », « gelé », ou « empêché de penser » selon l’expression du psychopédagogue Serge Boimare.
Leur intuition a ceci de correct qu’ils souffrent bel et bien d’un « blocage ». Nous accompagnons alors délicatement ces élèves vers les solutions les plus ajustées à leur problématique.
…à ne pas confondre avec une déficience ou un handicap !
Il s’agit en premier lieu de vérifier qu’il n’existe pas de réelle déficience, comme un trouble sévère lié aux chiffres, aux nombres, ou aux opérations qu’on leur demande d’effectuer. Il serait alors cruel d’insister auprès d’eux s’ils ne sont pas en capacité de résoudre certaines tâches.
Nous demandons régulièrement à certaines familles de faire effectuer un bilan neuropsychologique, par un neuropsychologue spécialisé, au sein d’une structure hospitalière éventuellement, ou dans un cabinet privé. Les résultats de ces bilans nous aident à mieux comprendre les schémas cognitifs des élèves et notamment leurs aptitudes hypothético-déductives.
La grande majorité du temps, on ne trouve pas de « déficience » mentale, ni d’altération des fonctions cognitives, mais une anxiété liée aux opérations mathématiques. On constate que c’est le plus souvent l’anxiété qui cause des difficultés, et pas le contraire !
Il s’agit donc de traiter ce problème comme une « phobie ». Pour savoir ce que le CPP offre aux élèves phobiques en général, nous vous invitons à consulter notre article sur la « phobie scolaire ». Pour savoir ce que le CPP offre aux élèves « dys » en général, vous pouvez consulter les articles sur les dys au collège et au lycée et les dys au primaire.
Voici ce que nous proposons plus précisément aux élèves souffrant de « phobie des maths »
Les solutions que nous proposons aux élèves souffrant de « phobie des maths »
Il peut être utile de comprendre d’où vient cette anxiété. A-t-elle été reçue d’un.e professeur des écoles lui ou elle-même phobique ? D’un parent revendiquant presque d’être « nul.le en maths » ? Ces questions peuvent être explorées pendant des réunions entre parents et professeurs. Et au CPP, on ne laisse aucun professeur (même pas les professeurs d’art, de philosophie ou de français !) revendiquer d’être « nul.le en maths », et surtout pas nos professeurs femmes, puisqu’il a été démontré que la « mathophobie » se transmettait malheureusement particulièrement bien entre femmes ! On est très vigilant, et on ne laisse aucun stéréotype de genre se développer, ni parmi les élèves, ni au sein de notre communauté enseignante !
Mais nos professeurs ne sont pas psychanalystes, ni psychologues, et même s’ils peuvent remarquer certaines choses, ils se contenteront d’alerter la famille sur ce point, et de leur proposer les coordonnées d’un professionnel spécialisé qui sera en mesure de confirmer, ou non, cette intuition, et de proposer une stratégie de remédiation à mettre en place avec l’équipe.
Notre approche des maths en primaire, au CPP junior
Notre enseignante spécialisée propose une remédiation multimodale à cette phobie
Des méthodes efficaces
Sans s’enfermer dans une seule approche, Laura privilégie les méthodes de Singapour et de Maria Montessori, permettant d’aller du simple vers le complexe, du concret vers l’abstrait. La manipulation est proposée à tous, et s’avère particulièrement efficace chez certains phobiques dont la peur s’estompe dès lors qu’ils peuvent bouger, manipuler et toucher. Sans entrer dans le détail de ces pédagogies, auxquelles Laura a été formée, nous souhaitons simplement rappeler que c’est la posture de l’enseignant qui fait bien plus que tout le matériel estampillé « Montessori » (Vigilance : le terme n’étant pas breveté, n’importe qui peut vendre du matériel dit « Montessori »), même si nous en utilisons aussi, avec discernement.
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Transdisciplinarité et médiation culturelle
En montrant que les chiffres et les nombres sont présents partout : de l’art à l’astronomie, en passant par les grands mythes fondateurs (desquels sont particulièrement friands les enfants) on décloisonne les mathématiques, on aide les élèves à les associer à des émotions et à des souvenirs agréables. On désapprend ainsi à associer mathématiques et douleur. On donne à la mémoire épisodique d’autres souvenirs …
Les mathématiques au collège, au CPP 7 et au CPP 15
Au collège, on poursuit cette association des mathématiques avec des activités agréables et plaisantes.
Ateliers pratiques
Pour tous nous élèves férus d’activités manuelles, nous avons mis en place des ateliers proposant de réaliser des objets artistiques, avec effets d’optique, des constructions, des tangrams, des objets fractals … Immense succès pour cet atelier qui a été mis en place par notre professeur de mathématiques au collège. Bravo à elle !
Ces mathématiques dont vous êtes le héros !
Pour nos petits rats de bibliothèques, que l’on retrouve régulièrement plongés dans les pages d’un roman, mais qui paniquent au moindre signe mathématique, nous avons écrit nous-mêmes une histoire en quatre parties, qui permet d’intégrer des opérations mathématiques à un récit romanesque. Les élèves doivent résoudre les opérations mathématiques pour débloquer la suite de l’histoire, conçue sur le principe de ces « romans dont vous êtes le héros ». Ces opérations mathématiques sont progressives et alignées avec les programmes de l’Éducation nationale : le niveau 1 propose des opérations à savoir maîtriser en 6e, le niveau 2, en 5e, le niveau 3 en 4e et le niveau 4 en 3e.
Nous avons eu un immense succès avec ces supports. Les élèves ne sont pas dupes. « J’ai bien vu ce que vous essayiez de faire, Madame, de me faire faire des maths alors que je déteste, mais bon, ça marche ! » nous témoignait ainsi L-C, grande lectrice, phobique des maths, qui avait dévoré notre roman !
En leur permettant ainsi d’accéder au plaisir des maths, on remplace des associations douloureuses par des associations agréables, tout en solidifiant les compétences et connaissances en arithmétique et en géométrie.
Vaincre la phobie des maths au lycée : pour qu’aucun élève ne choisisse plus ses spécialités par peur ni par défaut !
Normalement, au lycée, les problèmes de phobie doivent déjà avoir été résolus, mais nous accueillons parfois des lycéens qui souffrent toujours d’une phobie des maths.
Nous proposons à certains élèves de seconde les mêmes outils que ceux que nous proposons aux collégiens (ateliers et/ou « roman dont vous êtes le héros »). En seconde, le temps presse … Personne ne devrait avoir à choisir ses spécialités parce qu’il a « peur » !
Pour les lycéens ayant un objectif précis, nécessitant des mathématiques, mais souffrant toujours d’anxiété, on utilise entre autres des supports basés sur des objectifs spécifiques, par exemple, pour un élève souhaitant devenir pilote, nous utilisons des annales des tests psychotechniques Air France / HOP. Ces élèves regagnent souvent confiance en eux, ou au moins voient mieux l’utilité directe de l’exercice pour eux.
Jusqu’ici, les élèves nous arrivant en première ou en terminale et souffrant toujours de phobie des mathématiques se contentaient de ne choisir que des spécialités « sans mathématiques ». Avec le retour des mathématiques annoncé au bac, pour tous les élèves, cette stratégie d’évitement ne sera plus possible, et nous développons actuellement les outils nécessaires à l’accompagnement des élèves dans cette situation.
Est-ce que la réforme du « choc des savoirs », promise par Gabriel Attal, permettra d’améliorer le niveau en mathématiques des élèves français ? Nous le souhaitons sincèrement et nous réjouissons de voir certaines méthodes que nous utilisons depuis notre création (comme la méthode de Singapour) rejoindre l’arsenal des pédagogies de l’école publique. Au CPP, en tout cas, on garde le cap, et on continue d’accompagner les élèves en souffrance et qui ont besoin d’un soutien individualisé, pour que personne, plus jamais, n’ait à choisir sa trajectoire professionnelle par défaut, ou par peur. La « phobie des maths » existe bel et bien dans notre société, et elle est sûrement corrélée d’une manière ou d’une autre aux mauvais résultats des élèves français en mathématiques. Mais c’est une peur qui se dépasse très bien, dans un environnement adapté.